Vendre en Allemagne : les clés du premier marché d’Europe

Par Frédéric Berner, DG de CCI France Allemagne, avec l’autorisation de Patrick Heulin.
https://www.pointecoalsace.fr/Region/Le-Dossier/Frederic-Berner-04239.html

L’Allemagne est-elle l’Eldorado tant promis ? Malgré un ralentissement – très provisoire – de son économie, le pays reste un marché très convoité avec ses 83 millions d’habitants au pouvoir d’achat élevé et un excédent budgétaire de 13 milliards d’euros en 2019. Un record. « C’est un pays dans lequel il faut être, à condition d’y être bien préparé » confirme Olivier Klotz, Président du Medef Alsace. Car si le pays voisin attire les entrepreneurs, s’y développer n’est pas si facile.

Alors, quelles sont les clés du succès outre-Rhin ? Constituer un réseau est le premier enjeu des PME alsaciennes via des partenariats avec d’autres entreprises du même secteur déjà installées ou une association de compétences entre un distributeur et une start-up innovante qui ciblent l’Allemagne avec un produit très spécifique. Une stratégie moins coûteuse et plus facile à mettre en œuvre qu’une installation dans le pays. Le rachat d’une société allemande peut aussi être le point de départ d’une implantation en Allemagne. « L’Allemagne est un pays d’acheteurs, qui choisit d’abord des partenaires partageant sa culture des affaires », souligne Olivier Klotz, à l’origine d’une étude comparative France-Allemagne avec la société KPMG. « Cette étude montre qu’il est tout à fait intéressant pour un entrepreneur alsacien d’implanter une filiale en Allemagne, complète Julien Keller, expert-comptable chez KPMG. Pour la proximité et le potentiel du marché allemand certes, mais aussi du fait d’une fiscalité plus avantageuse outre-Rhin. Etre implanté, c’est développer les ventes avec une fiscalité allemande, un personnel, un stock et un service après-vente locaux. » Basée à Sarrebruck, la CCI France-Allemagne – qui accompagne ces stratégies d’implantation – confirme la tendance : en 2019, elle a enregistré la création de 49 nouvelles implantations françaises en Allemagne et 240 sociétés tricolores sont actuellement domiciliées à la CCI France-Allemagne, dont plus de 7 % sont alsaciennes. D’autres entreprises font le choix d’exporter en direct leur savoir-faire et leur technologie mais après une étude de marché très poussée.

« Avant de penser business, il faut veiller à bien qualifier son offre par rapport aux besoins du marché, insiste Didier Hoffmann, Directeur de la CCI International Grand Est. Les Allemands ont une logique d’achat très pointue qui repose sur trois mots clés : flexibilité, sécurité et confiance. Ils sont aussi très gourmands en service client. La clé, c’est de progresser par étape pour tendre vers l’implantation locale qui va ensuite permettre de passer à la vitesse supérieure et de démultiplier les résultats en accédant plus facilement aux marchés d’Europe de l’Est à partir d’une base allemande. » L’improvisation n’ayant pas sa place dans les relations commerciales avec les Allemands, mieux vaut donc s’entourer de spécialistes pour approcher efficacement ce marché. La CCI International Grand Est et son homologue de Sarrebruck sont en première ligne pour conseiller les entreprises régionales et les aider à répondre au niveau d’exigence de l’Allemagne. « Nous déployons tout un panel d’outils pour permettre aux PME alsaciennes d’établir les premiers contacts avec d’autres entreprises, nouer des partenariats, valider une stratégie d’implantation ou de rachat, finaliser des recrutements, poursuit Didier Hoffmann. Cela va du conseil technique, juridique et stratégique aux missions de prospection jusqu’à la préparation d’un salon professionnel, en passant par la relecture de contrats pour évaluer leur conformité douanière, la mise en relation et les rendez-vous B to B via la base de données Enterprise Europe Network (EEN) et bien sûr la formation linguistique et commerciale avec CCI Campus Alsace. C’est un accompagnement à 360° qui s’appuie sur l’expertise de nos 24 conseillers, leur connaissance du marché et leur maîtrise des aspects réglementaires. » Une ingénierie et un accompagnement devenus indispensables pour réussir sur le premier marché européen.

« Les Allemands ont une logique d’achat très pointue qui repose sur trois mots clés : flexibilité, sécurité et confiance. »

L’Allemagne représente 31,4 % des exportations alsaciennes. Un chiffre en hausse de 1,2 % par rapport à 2018. Ce volume correspond à un montant global d’environ 11 milliards d’euros. L’industrie est le moteur de ces exportations. Elle constitue 23 % du PIB en Allemagne, 16 % en Alsace et 11 % pour l’ensemble de la France.

Les salons professionnels sont incontournables pour les exportateurs alsaciens. Et l’Allemagne est championne dans l’organisation de ces rendez-vous, véritables accélérateurs de business. La Foire de Hanovre (du 24 au 30 avril 2020) est l’occasion de rendez-vous B to B très pointus. Le salon Innotrans à Berlin (du 22 au 23 septembre 2020) est le plus grand salon mondial du secteur ferroviaire et urbain. Le salon IE à Fribourg (du 27 au 29 janvier 2021) est une vitrine internationale de la sous-traitance industrielle et mécanique. Sans oublier l’ANUGA à Cologne, le premier salon mondial de l’agro-alimentaire prévu du 9 au 13 octobre 2021. Les équipes de la CCI International Grand Est accompagnent les entreprises dans la préparation et le suivi de ces événements. Les entrepreneurs peuvent aussi s’inscrire au Programme Impact Europe (jusqu’au 24 avril). Lancé par Business France, il aide les entreprises du digital à étendre leur réseau en Allemagne, bénéficier de retours d’expériences et in fine pérenniser leur développement outre-Rhin. Toutes les infos dans le Programme Régional Export. Contact CCI International Grand Est : Claudia Scanvic c.scanvic@grandest.cci.fr

Frédéric Berner Directeur général de la CCI France Allemagne © DR« Lorsqu’un entrepreneur alsacien, qui veut exporter en Allemagne, consulte nos services, nous lui faisons en général trois recommandations. Tout d’abord, nous lui conseillons de « germaniser » autant que possible son approche commerciale. L’implantation locale et la maîtrise de la langue allemande sont à cet égard fondamentales. L’Allemagne est aussi un pays de spécialistes et les entreprises, qui affichent un savoir-faire spécifique, ont plus de chances de réussir. Les Allemands ont davantage tendance à faire confiance à un fournisseur qui est le meilleur dans sa catégorie plutôt qu’à un prestataire « fourre-tout », fut-il innovant et créatif. C’est une grosse différence avec la France. Enfin, sur un marché aussi bataillé où les habitudes sont bien ancrées, il est important de s’inscrire dans le long terme. Les Allemands ont un autre rapport au temps. Les relations dans la négociation d’affaires nécessitent un travail au long cours. Si vous recherchez un retour sur investissement rapide, n’allez pas en Allemagne ! »