Plan de relance en Allemagne – Partie 3 : Industrie et Green Tech

11.09.2025

Relancer la croissance et restaurer la compétitivité du pays, ce sont les objectifs principaux de la coalition politique en place en Allemagne. Après avoir traités les secteurs des infrastructures, l'investissement et l'innovation, décryptage dans un 3ème volet du soutien du gouvernement pour l'industrie et la green tech.

Hydrogène, électromobilité, batteries, économie circulaire, efficacité énergétique… L’Allemagne engage une refonte industrielle massive, soutenue par des dizaines de milliards d’euros d’investissements publics et de programmes de financement.
Objectif : redevenir une puissance industrielle verte et compétitive, tout en sécurisant les coûts de l’énergie pour les entreprises.

Pour les PME françaises, premier partenaire commercial de l’Allemagne, le moment est propice : partenariats technologiques, intégration dans des projets européens (IPCEI) ou implantation locale dans les clusters spécialisés.

Une industrie décarbonée, compétitive et subventionnée

L’un des piliers du plan : garantir un coût énergétique attractif pour l’industrie allemande.

  • Strompreispaket : financement fédéral pour stabiliser un prix de l’électricité bas pour les industriels.
  • Suppression de la taxe sur le stockage de gaz.
  • Réduction des coûts de raccordement au réseau pour les grands sites industriels.

Ces mesures visent à repositionner l’Allemagne comme une terre compétitive pour les industries électro-intensives, de la chimie à l’acier.

Hydrogène : passage à l’échelle industrielle

L’hydrogène est le vecteur central de la stratégie énergétique allemande :

  • Extension et financement du réseau hydrogène national (Wasserstoffkernnetz) pour connecter tous les pôles industriels.
  • Déploiement de capacités de production via électrolyse (centralisée et décentralisée).
  • Soutien accru aux importations (IPCEI H2, H2 Global).
  • Mise en place d’une certification rapide et fiable des sources de H2 pour sécuriser les approvisionnements.

Un virage clair : du pilote vers le déploiement industriel massif.

CCS et CCU : l’Allemagne franchit le cap

Un tabou est levé par le nouveau gouvernement qui compte autoriser le captage et stockage du carbone (CCS) ainsi que son utilisation (CCU) pour les secteurs où les émissions sont difficiles à éviter (acier, ciment, chimie). Ces technologies d’émissions négatives devraient être autorisées offshore en mer du Nord et onshore si les locaux l’acceptent. De plus, l’Allemagne affiche son ambition de soutenir d’autres technologies comme le Direct Air Capture (DAC) en complémentarité des méthodes CCS.

Automobile et batteries : transformation encadrée

L’industrie automobile allemande reste un secteur stratégique, mais en tension. La coalition adopte une approche technologie ouverte, tout en renforçant les incitations à l’électrification :

  • Prime à l’achat de véhicules électriques.
  • Relèvement du plafond fiscal pour les voitures de société électriques à 100 000 €.
  • Maintien des soutiens aux PHEV et véhicules hydrogène.
  • Programme dédié à la filière batteries : extraction, recyclage, usinage.

Une stratégie pragmatique : accompagner la mutation, sans interdiction stricte des moteurs thermiques d’ici 2035.

Industrie lourde & chimie : mutation sous haute protection

  • Acier : soutien au développement de l’acier vert avec quotas et financements dédiés.
  • Maintien des safeguards anti-dumping au-delà de 2026.
  • Agenda Chimie 2045 : feuille de route pour transformer la chimie, la pharma et la biotech.

Energie, chaleur, efficacité : vers un mix plus flexible

Le gouvernement mise sur un mix énergétique plus flexible afin d’améliorer l’efficacité du réseau. Cela s’illustre à travers l’accélération du déploiement de réseaux de chaleur via BEW par une loi dédiée, le soutien au cogénération (KWK) industriel, la réforme de l’efficacité énergétique appuyée par une fiscalité incitative et le déploiement de capteurs et de smarts meters.

Comparaison aux mesures précédentes

DOMAINE COALITION PRÉCÉDENTE COALITION 2025
HYDROGENE Stratégie amorcée (National H2 Strategy) Passage au déploiement industriel avec réseau, ports, financement IPCEI
CCS Tabou réglementaire Adoption complète avec lois, zones offshore, autorisation Direct Air Capture
AUTOMOBILE Soutien à l’électrique avec quotas Prime élargie + incitation PHEV + tech open, fin de l’interdiction des véhicules thermiques d’ici 2035
ENERGIE Objectifs ambitieux mais flous Stratégie claire, soutien cogénération, flexibilité tarifaire
INDUSTRIE Projets pilotes (Dekarbonisierung Industrie) Intégration massive + quotas verts + CBAM ajusté

Aéronautique & Défense : des secteurs redevenus prioritaires dans la stratégie industrielle allemande

Face aux enjeux géopolitiques et à la pression de l’OTAN, l’Allemagne a amorcé une transformation radicale de son modèle budgétaire.

En mars 2025, le Bundestag a adopté une réforme constitutionnelle qui permet de contourner le « frein à l’endettement » pour les dépenses militaires au-delà de 1 % du PIB, ouvrant ainsi la voie à des financements massifs.

Un fonds spécial de 500 milliards d’euros (Sondervermögen) a été lancé pour couvrir les dépenses de défense et d’infrastructures sur 12 ans, dont une large part est dédiée à la modernisation militaire, à la cybersécurité et au spatial. Il vient compléter le fonds de défense de 100 milliards d’euros qui avait été lancé dès 2022 pour moderniser la Bundeswehr.

Résultat : l’Allemagne devrait porter ses dépenses de défense à 62 Mds €, soit 2,4 % du PIB en 2025, avec une trajectoire prévue à 3,5 % d’ici 2029 (≈ 160 milliards € annuels).

Mesures concrètes pour l’Aéronautique & la Défense

  • La Bundeswehr bénéficie d’un budget annuel de 60–63 Mds €, avec des projets d’équipement d’envergure (chars Leopard 2, hélicoptères, drones, F-35, infrastructures numériques, etc.) utilisant les fonds spéciaux
  • Des commandes majeures ont été passées : 105 chars Leopard 2 supplémentaires pour plus de 2,9 Mds €, visant une flotte de près de 1 000 chars y compris le futur MGCS.
  • Des programmes collaboratifs européens comme SCAF (système du futur de combat aérien), les missiles, ou l’espace militaire sont maintenus avec des budgets pluriannuels garantis
  • Les grands groupes (Airbus Defence & Space, Rheinmetall, Hensoldt, MTU Aero Engines) voient leur carnet de commandes renforcé et bénéficient de la visibilité financière nécessaire pour investir. Les PME allemandes intégrées dans ces filières profitent d’un effet d’entraînement massif, avec des projets collaboratifs soutenus par l’État et l’Union européenne.

Quelles opportunités pour les entreprises françaises ?

L’Allemagne entre dans une phase d’investissements massifs et ciblés, avec des financements publics qui dépassent les 600 milliards € cumulés (industrie, infrastructures, énergie, défense). Pour les entreprises françaises, il s’agit d’un moment charnière : participer à ce mouvement, c’est accéder à l’un des plus grands marchés d’Europe en transformation et renforcer durablement leur compétitivité au sein du couple franco-allemand.

Dans l’industrie et la Greentech, Berlin mise sur l’hydrogène, les batteries, la décarbonation et les technologies circulaires pour redevenir la locomotive industrielle verte de l’Europe.

Dans la défense et l’aéronautique, les choix budgétaires sont sans précédent depuis l’après-guerre, avec plus de 100 milliards € déjà affectés et une trajectoire de dépenses de 3,5 % du PIB d’ici 2029, soutenant massivement Airbus Defence, Rheinmetall, MTU ou encore les PME technologiques locales.

Ces deux piliers – industrie verte et sécurité/défense – ne sont pas cloisonnés : ils s’appuient sur des technologies transversales (IA, robotique, capteurs, cybersécurité, matériaux avancés) où les entreprises françaises disposent d’atouts solides.

Pour les PME françaises, trois grandes opportunités se dessinent :

  • S’intégrer dans les grands programmes allemands (hydrogène, CCS, batteries, modernisation de la Bundeswehr) en tant que fournisseurs de technologies ou de services.
  • Nouer des partenariats industriels transfrontaliers, notamment dans le cadre de projets IPCEI européens ou de coopérations franco-allemandes stratégiques (SCAF, hydrogène, mobilité électrique).
  • Renforcer leur présence locale en Allemagne, que ce soit par une implantation, une croissance externe ou un rapprochement avec des clusters industriels, afin de capter durablement la demande.

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