L’Allemagne, face au défi de la décarbonation de son industrie

01.07.2024

L’Allemagne, souvent qualifiée de locomotive économique de l’Europe, a une longue tradition industrielle qui remonte à l’époque de la révolution industrielle. Au cours des XIXe et XXe siècles, le pays s’est imposé comme un leader mondial dans plusieurs secteurs clés, notamment la sidérurgie, la chimie, l’ingénierie mécanique et l’automobile. Cette concentration industrielle intensive a conduit à l’appellation « d’industrie lourde ».

Avec plus de 24,5% du PIB, l’industrie joue un rôle économique majeur dans le pays, mais elle est également l’un des principaux contributeurs aux émissions de gaz à effet de serre, GES. Le secteur industriel a généré 144 millions de tonnes de CO₂ en 2023 soit environ 24% des émissions de CO₂ totales du pays. A titre d’exemple, la sidérurgie représente 6% des émissions de GES du pays. Cette forte dépendance aux énergies fossiles et aux processus industriels intensifs en carbone constitue un défi majeur dans le contexte de la transition énergétique vers une économie bas carbone.

© Statista 2024

Si la France prévoit une enveloppe de 5 Mrds € dédiés aux efforts de décarbonation dans l’industrie dans le cadre de son Plan France 2030 ; l’effort du gouvernement allemand est d’une tout autre ampleur.

Pour répondre à ces défis, le gouvernement fédéral s’est fixé des objectifs ambitieux avec une neutralité climatique à l’an 2045. Un objectif de mi-parcours est prévu pour 2030 avec la diminution de 65% des émissions de GES par rapport à 1990. Pour atteindre ces différents paliers, l’une des priorités est de développer et d’adopter des technologies innovantes dans le secteur industriel afin de réduire les émissions de CO₂ tout en maintenant la compétitivité du pays.

Les objectifs se concrétisent sur le terrain avec le lancement en mars 2024 d’un programme bas carbone avec des subventions de l’Etat pour les entreprises qui souhaitent décarboner leurs usines. Ce programme, intitulé « contrat carbone pour la différence » est proposé en priorité aux industries les plus énergivores émettant plus de 10 kilotonnes de CO₂ par an. Cela concerne des entreprises notamment dans les secteurs du verre, du métal, du papier, de l’acier et de l’aluminium.

Un contrat est établi sur une durée de 15 ans. Si au cours de cette période, la production issue de techniques moins polluantes devient plus rentable que la production conventionnelle, les entreprises bénéficiaires devront rembourser une partie des aides perçues. Une première phase du programme prévoit la répartition de 4 milliards d’euros. Un deuxième appel à projets, prévu pour l’automne, portera sur un montant de 19 milliards d’euros de subventions supplémentaires.

Le sidérurgiste allemand Thyssenkrupp, deuxième en Europe derrière ArcelorMittal, situé dans la Ruhr, est un bon exemple de décarbonation industrielle. En effet, l’entreprise souhaite transformer ses quatre haut-fourneaux de Duisbourg en remplaçant le charbon par de l’hydrogène pour continuer à fabriquer de l’acier.

La coopération entre l’Allemagne et la France dans le domaine de la décarbonation industrielle est prometteuse et s’illustre à travers plusieurs projets.

Coopération dans le cadre du programme Horizon Europe

L’Allemagne et la France participent activement au programme de recherche et d’innovation de l’Union européenne, Horizon Europe, qui finance des projets visant à promouvoir la décarbonation industrielle. Les entreprises et les instituts de recherche des deux pays travaillent ensemble sur des initiatives axées sur les technologies propres, les matériaux durables et les pratiques industrielles innovantes.

Partenariats entre entreprises

Plusieurs entreprises allemandes et françaises collaborent étroitement pour développer et déployer des solutions technologiques innovantes visant à réduire les émissions de CO2 dans divers secteurs industriels. C’est le cas de Siemens Energy (Allemagne) et Air Liquide (France) associés dans la construction d’une « gigafactory » à Berlin d’une capacité d’électrolyse de trois gigawatts afin de produire plus de 300 000 tonnes d’hydrogène vert par an d’ici 2025.

Dans ce contexte, la décarbonation de l’industrie allemande ouvre des opportunités stratégiques pour les PME françaises spécialisées dans les technologies propres, l’efficacité énergétique, les outils de mesure et les solutions durables.

Pour les PME françaises souhaitant s’implanter ou se développer dans le marché de la décarbonation en Allemagne, il est crucial de :

• Comprendre les réglementations environnementales allemandes et les normes industrielles.
• Identifier les secteurs industriels allemands les plus impactés par la décarbonation.
• Développer des partenariats locaux avec des entreprises allemandes spécialisées dans les technologies propres.
• Investir dans la recherche et l’innovation pour proposer des solutions adaptées au marché allemand.
• Mettre en avant les avantages concurrentiels liés à la durabilité et à la responsabilité environnementale.

La décarbonation de l’industrie en Allemagne représente un défi complexe mais nécessaire pour atteindre les objectifs climatiques. Pour cela, l’Etat apporte un soutien financier afin d’aider les entreprises à se transformer tout en restant compétitives. Ce contexte est une opportunité de développement économique durable pour les entreprises européennes, y compris les PME françaises. En adoptant une approche stratégique et en investissant dans l’innovation, les entreprises peuvent jouer un rôle clé dans la transformation vers une industrie plus verte en Allemagne.

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